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Investissement locatif : savoir vérifier sa conformité

Le thème est ici un peu moins sexy que l’habituel “devenez rentier en investissant dans l’immobilier en loi Pinel” mais la non-conformité à l’urbanisme des investissements immobiliers est à l’origine de nombreux drames. On va surtout prendre en compte dans cet article l’immeuble de rapport. 


La notion de division

Un immeuble de rapport est composé de plusieurs appartements. En le visitant, on constate effectivement que chaque appartement possède sa porte d’entrée, sa cuisine, sa salle de bain, son bail de location etc.

Si ces appartements existent bien dans les faits, est-ce qu’ils existent aux yeux de la toute-puissante Mairie, de l’urbanisme, du Fisc ? 

A l’origine, beaucoup de ces immeubles de rapport étaient probablement de grandes maisons, qui abritaient une seule famille. 

Ils ont été par la suite « divisés » par des investisseurs en plusieurs petites surfaces, selon un découpage qui optimise le rendement de chaque m2. 

On comprend qu’une maison de 100m2 avec un seul loyer familial génère moins de revenus locatifs que quatre studios de 25m2 avec quatre loyers étudiants. Ainsi naît ce qu’on appelle l’immeuble de rapport.

Mais une division est une opération urbanistique lourde, qui implique souvent le dépôt d’un permis de construire ou d’une déclaration préalable de travaux en Mairie. En un mot cette division doit être autorisée par l’urbanisme. 

Ces divisions ne sont pas gratuites. Les mairies, vie les plans locaux d’urbanisme (PLUs), ont mis en place une obligation de création ou d’achat de places de parking pour chaque « création » de lot issu de la division, ou le paiement d’une taxe de stationnement annuelle assez conséquente. 



Face à la lourdeur administrative et au coût des obligations de stationnement qu’implique une division légale, beaucoup se tournent vers la division sauvage, sans autorisation. 

Les conséquences de la réalisation de travaux de division sans Déclaration Préalable (DP) ou Permis de Construire (PC) peuvent être lourdes le jour où les agents de l’urbanisme s’en rendent compte. 

Worst-case scenario une obligation de remise en l’état pré-division peut être mise en place, ou bien une interdiction de louer à plusieurs locataires dû à l’inexistence juridique des lots. Ce qui peut remettre en cause la rentabilité d’un investissement locatif.

Un immeuble divisé dans les règles de l’art urbanistique est un immeuble dont les lots sont dits « cadastrés », car ils sont clairement répertoriés à la matrice cadastrale de la ville. 

Les immeubles non-cadastrés sont vendus en général moins chers que les immeubles cadastrés, pour attirer les investisseurs immobilier amateurs, ou pour compenser le risque juridique par un discount sur le prix. 



Comment vérifier que les lots d’un immeuble sont bien cadastrés ? 

D’abord, regarder le titre de propriété fourni par le vendeur. Indique-t-il explicitement le bon nombre de lots ou est-il vague quant au découpage juridique de l’immeuble ?

Ensuite, demander à son notaire ou directement sur le site des impôts un relevé de propriété, également appelé extrait ou relevé de matrice cadastrale.

C’est un document de nature fiscale - il indique surtout le nombre de taxes d’habitation distinctes payées par les locataires - et non urbanistique. Il donne un premier niveau de preuve de reconnaissance officielle du nombre de locataires dans l’immeuble.

D’autant que dans beaucoup de villes, comme celles du Nord, il y a une équivalence probatoire entre le relevé de matrice cadastrale et sa valeur urbanistique. Autrement dit la Mairie est d’accord avec ce que disent les Impôts. 

Pour les autres villes on peut essayer à l’ancienne : appeler la mairie, demander à parler au département urbanisme, indiquer l’adresse de l’immeuble et demander combien de lots sont officiellement cadastrés d’après leur registre. Le petit côté dénonciation en Mairie d’un vendeur qui ne l’a pas voulu n’est pas très esthétique néanmoins.

Deuxième niveau de preuve : demander à son notaire de vérifier l’historique de propriété de l’immeuble, sur au moins deux ou trois mutations. Les titres de propriété successifs doivent indiquer clairement le même nombre de lots de manière continue, preuve qu’aucune division n’a eu lieu au cours du délai de prescription potentiel.

Enfin, si le vendeur ou la vendeuse reconnaît avoir fait la division, lui demander les documents d’urbanisme qui prouvent que cette division a bien été autorisée par la Mairie : Déclaration Préalable (DP) ou Permis de Construire (PC). 

Dernière méthode, infaillible, inscrire en condition suspensive au compromis une régularisation a posteriori de la division, quand le vendeur n’a pas su prouver la régularité de celle-ci. 

Cela passe à nouveau par le dépôt ex-post d’une DP ou d’un PC en mairie, de nature symbolique puisque les travaux ont été faits ex-ante, mais qui force la mairie à donner un avis définitif sur la validité juridique de la division avant la vente, légèrement retardée de ce fait.

Petite technique : vérifier le nombre de compteurs électriques EDF / Linky : s’il y en a un par lot c’est bon signe, en revanche s’il n’y a qu’un seul compteur pour tout l’immeuble c’est possiblement que les lots ne sont pas cadastrés et qu’il s’agit d’un seul et unique lot reconnu en Mairie (et donc un seul compteur). 

Par ailleurs, la revente d’électricité étant interdite, la gestion locative d’un immeuble à compteur unique peut à long terme se révéler être un vrai-casse tête quant à la répartition des charges locataires.



Faire cadastrer des lots ex post

Peut-on acheter un immeuble non-cadastré et le faire cadastrer après coup pour pouvoir le louer légalement à plusieurs locataires ? 

Oui, à condition de ne pas être phobique administratif. Il faudra interroger la mairie locale sur les conditions de division imposées par le Plan Local d’Urbanisme. 

Il faudra déposer, selon les mairies, au mieux une Déclaration Préalable de Travaux, au pire un Permis de Construire ou, comme à Lille, une « autorisation préalable aux travaux de division de logements », autrement appelé « permis de diviser ». 

Pour obtenir ce permis de diviser, le demandeur doit remplir un dossier en trois exemplaires détaillant notamment la nature et la consistance des travaux. 

Après son instruction, à l’occasion de laquelle l’architecte des Bâtiments de France peut intervenir le cas échéant, l’urbanisme dispose quinze jours pour répondre, son silence valant autorisation tacite. 

Il faut enfin être prêt à financer l’achat de places de stationnement, et la pose de compteurs individuels EDF / Linky. 

Autrement, le seul projet envisageable sur un immeuble non-cadastré serait un projet de colocation ou coliving à bail unique solidaire, puisqu’on aurait bien alors 1 lot cadastré et un bail unique de location relatif à ce lot.


Vérifier la destination des lots

Autre point urbanistique à vérifier systématiquement : quelle est la destination des lots de l’immeuble. 

Certains immeubles sont dits « mixtes » car ils contiennent plusieurs types de lots, des lots résidentiels, des locaux commerciaux, des locaux pros comme des bureaux ou cabinets médicaux. 

On ne peut pas louer une surface commerciale en bail résidentiel, et inversement. On peut en revanche demander un changement de destination d’un lot en Mairie pour transformer une surface commerciale en surface résidentielle, en fonction des règles du  Plan Local d’Urbanisme. 

Il faut donc vérifier, en checkant le relevé de matrice cadastrale ou en demandant directement à son notaire, la destination des lots achetés afin d’avoir des baux de location en règle avec leur nature.



Vérifier les éléments de façade :

Pour faire simple, dès qu’un vendeur a touché à un élément de la façade d’une maison ou d’un immeuble, il faut lui demander de justifier d’une autorisation de l’urbanisme (DP ou PC validé par la Mairie). 

C’est d’autant plus vrai pour les monuments historiques, qui sont des investissements immobiliers qui donnent droit à des avantages fiscaux. La réduction d’impôt est équivalente aux travaux réalisés pour réhabiliter le monument. 

Ce dispositif fiscal, peu connu, implique souvent un important budget travaux mais est assez efficace pour réduire vos impôts.

Mais même si la façade n’est pas classée, la moindre réalisation de travaux extérieurs doit être déclarée et autorisée, ou faire l’objet d’une régularisation en Mairie ex-post. A bien vérifier lorsque l’on fait une transaction immobilière.

Quant aux travaux intérieurs réalisés par le vendeur, ils peuvent parfois être soumis à l’obligation d’une déclaration préalable en Mairie, dont la preuve doit être fournie. 

Ça peut être le cas par exemple pour la transformation d’un garage en habitation, de la création de surface de plancher, la pose d’un nouveau velux...

Il faut notamment être prudent avec les vendeurs amateurs de déficit foncier. Avec ce régime, la déductibilité des travaux permet d’effacer les revenus fonciers et de les excéder générant ainsi un déficit fiscal limité à 10.700€ par an, déductible du revenu imposable. 

On constate que l’avantage fiscal des travaux prime souvent sur la diligence urbanistique des vendeurs.

Les règles d’urbanisme face à la location meublée touristique

Pour les amateurs de location courte durée à l’année - légalement possible sans limitation de jours uniquement sur une surface commerciale - faire le changement de destination du résidentiel vers du commercial est plus compliqué. 

Ça n’est pas le cas partout en France mais à Paris et dans certaines grandes villes, cela implique une opération lourde dite de « compensation ».

Il faut compenser à la ville la perte de m2 commerciaux issus du changement de destination sur un lot (de résidentiel vers commercial) en faisant l’opération inverse sur un autre lot (de commercial vers résidentiel) et en respectant un certain ratio de compensation fixé par la Mairie. 

Si le demandeur ne possède pas de local commercial à proximité pour faire l’opération de compensation, il devra racheter de la commercialité auprès d’une « Bourse de la Commercialité ». Sweet.

Investir dans l’immobilier est a priori une bonne idée à condition d’éviter au moins deux écueils : ne jamais investir dans un dispositif Pinel (hors sujet mais ça fait du bien de le dire), et vérifier la conformité à l’urbanisme de l’investissement locatif en question. Pour un investisseur se constituant un patrimoine long terme, la sécurité juridique doit parfois primer sur la pure rentabilité. Better safe than sorry.


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